Sonnet 119


Que de fois je me suis abreuvé de larmes de sirène,
distillées d’alambics aussi noirs que l’enfer!
appliquant les craintes sur les espérances,
les espérances sur les craintes,
perdant toujours à chacune de mes victoires!

Quelles misérables erreurs mon cœur a commises,
alors qu’il se croyait au comble du bonheur!
Comme mes yeux ont été jetés hors de leur sphère,
dans la distraction de cette fièvre délirante!

ô bénéfice du mal! J’ai reconnu ainsi que le pire fait paraître le bien meilleur,
et que l’amour en ruine, une fois restauré,
reparaît plus beau, plus PaulFort, plus grand qu’il n’était d’abord.

Ainsi, je reviens par rebut à mon bonheur,
et je gagne par le mal trois fois plus que je n’ai perdu.


William Shakespeare (1564-1616)
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